Mademoiselle Fayel s’invite à la Table des Dames
Redonner aux femmes leur place dans les métiers de la table, et pas qu’en cuisine, voilà l’objectif de l’événement organisé par le chef Jean-François Beaux. Un repas gastronomique, avec nos crèmes glacées en dessert, assurément le point de départ d’une belle aventure.
« Six mois de préparation. » Le ton est donné par le chef Jean-François Beaux, au cœur des cuisines du lycée hôtelier de La Guerche-de-Bretagne (Ille-et-Vilaine). « C’est une jolie publicité pour la campagne que d’avoir ce repas organisé ici. Il n’y en a pas que pour les villes », se réjouit Julie Lemesle.
Il a contacté des femmes de toute la France. Des sommelières, une cheffe de salle d’un restaurant doublement étoilé, deux meilleures ouvrières de France et des cheffes cuisinières pour les faire travailler avec ses élèves et Mademoiselle Fayel pour ajouter la touche sucrée au repas gastronomique.
« L’événement du jour n’est pas un objectif en soi, son but est de créer une association de femmes, avance Jean-François Beaux. Ce ne sera pas une première, il y en a eu une en 1975. Et pourtant, les choses n’ont pas vraiment changé : avec autant de mérite, les femmes n’ont que peu de reconnaissance. »
« Dire aux filles qu’il y a de la place »
En cuisine, Emilie Villon lui emboîte le pas : « Nous sommes là pour dire aux jeunes filles qu’il y a de la place en cuisine, il y a un gros marché du travail. » La cheffe venue de Carpentras insiste sur la demande d’égalité, les différences de salaires mais voit aussi d’autres intérêts à cet événement national. « C’est l’occasion d’apprendre aux jeunes filles ici de nouvelles recettes, de parler entre nous de nouvelles tendances », ajoute-t-elle.
Avec plus de 110 convives, les femmes ont travaillé toute la journée. Après la préparation des queues de lotte et des magrets de canard, place au dessert. Dites plutôt : pré-dessert ! Mademoiselle Fayel a concocté une glace à la verveine citronnée pour « faire de la place dans l’estomac avant le dessert ».
« C’est génial de pouvoir rencontrer du monde avec l’envie de construire ensemble, de se faire connaître aussi », explique Julie Lemesle.
Et ça marche, tout le monde veut goûter les différents parfums. L’heure est donc aux échanges, Julie regrette que « la place des femmes au quotidien soit en cuisine, mais pas quand on sort de la sphère familiale ».
Sortons des cuisines pour aller rencontrer la cheffe de salle. Claire Bâcle travaille dans un restaurant noté deux étoiles au guide Michelin à La Plaine-sur-Mer. Elle montre aux étudiantes comment elle souhaite voir la table disposée. Elle est ravie d’une telle pluralité de femmes : « Il y a des grandes cheffes comme des cheffes à domicile, de tous les milieux donc. C’est superbe ! » Comme ses consœurs, Claire Bâcle subit l’hégémonie masculine à son poste. « Quand on grimpe dans les échelons, il y a de la jalousie, des remarques », déplore-t-elle.
Les choses changent, petit à petit. À La Table des Dames de les accélérer vers l’égalité. Mademoiselle Fayel s’inscrit pleinement dans le projet, et ce nécessaire changement social.
Rédaction : Charles Lemercier